Je suis née au pays de
la lumière.
Elle ne m’a pas quittée
même quand les volets semblaient ne jamais vouloir s’ouvrir.
Persiennes abimées,
paupières closes.
Je comptais les rayons
qui traversaient la pièce.
Je me suis retrouvée
maintes fois paralysée ; je sentais la douce présence de ma grand-mère à mes côtés — nous
dormions dans la même chambre — et malgré cette présence bénie, je n’arrivais
ni à ouvrir les yeux, ni à l’appeler.
C’était une sensation
atroce d’impossibilité, d’incapacité, de dépendance,
Une douleur lourde et
pesante,
Un trouble oppressant,
Une mort.
Mais je saisissais, au
dernier instant, avant la chute fatale, cette promesse de vie et la lumière jaillissait
toujours au bout de longues minutes d’immobilité, d’aveuglement et de silence,
Sans effort,
Juste par la pensée,
Juste par la prière intense,
Juste par ta
puissance.
Souverain.
Même quand les cœurs pourrissaient à la cave,
Même quand on m’avait
humiliée par des ricanements saccadés,
Même quand il faisait
froid et que l’urine empestait les draps à la fin d’une nuit agitée,
Même quand il est parti.
Même quand le village
a été englouti.
Même quand il m’a fait
peur.
Même quand ça m’a
terrifiée.
Même quand mon enfant
m’a quittée.
Même quand il est mort.
Même quand j’ai
abandonné sa vie, la promesse était là, tapie, enfouie dans l’inimaginable,
ressortant du néant coûte que coûte.
…
Je suis née au pays de
la lumière et elle m’a brûlée les yeux.
J’ai mis longtemps à
comprendre que les ombres étaient une provision.
J’étais aveuglée,
muette, mais j’emmagasinais la chaleur des présages.
…
Les nuits ont succédé
aux jours et les ombres sont devenues vivantes.
Elles se sont mises à
balbutier, à me bercer.
Alors, sagement, j’ai
tenté de passer sous le porche, d’avancer calmement sans me retourner.
Toujours le même porche.
Tu le connais surement,
toi qui fais des villages provençaux, l’endroit privilégié de tes vacances.
Ce porche si typique.
Chacune des pierres
qui le portent, raconte l’histoire de cette lumière qui passe avec le vent pour
caresser nos rêves.
Et l’espoir peut renaître
et surgir sans crier gare.
Et la vie retentira dans
tes veines.
Tu ne pleureras plus.
Tu remercieras.
Tu t’agenouilleras
devant tant de grâce.
Tu tenteras de
demander pardon, tout en sachant que tu es pardonnée.
Tu seras dans un
tourbillon de souvenirs qui ne t’appartiendront plus.
Les pierres
centenaires te crieront d’écarquiller les yeux et de te laisser emporter par
cette Gloire indéfinissable.
Tu seras en paix.
Tu souriras.
…
En attendant, je mets dans
des cartons les bribes d’une vie de fuite, ce qui me reste oui, de ce départ précipité
qui m’a conduite jadis vers le sombre, le froid, le glacé.
J'emballe des choses
qui finiront dans le feu géant du passage.
Je ne m’inquiète pas, je ne m’inquiète plus.
Je bavarde et quand
les gens remarquent ma pointe d’accent, je souris.
La promesse m’accompagne
toujours.
Maintenant, je la
saisis.
C’est vrai, je suis née au pays de la lumière...
Annick SB
juin 2019
Beau texte, bravo.
RépondreSupprimerMerci beaucoup !
Supprimerje suis une fille du soleil, née en juin sous sa chaleur j'ai poussé comme une fleur ...
RépondreSupprimertrès beau texte fille des lumières !
amitié .
Merci Claudeleloire ensoleillée !!
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