C'est comme ça !

 



UNIVERSITE de PROVENCE

Amphithéâtre V : Cours de littérature comparée.

Maitre de conférence : Madame RAVIE

 

- Bonjour chers étudiants !

Nous nous sommes quittés mardi dernier avec une réflexion sur l’humour dans la littérature.

Nous allons aujourd’hui traiter de l’illusion dans la littérature, à partir de la citation du célèbre Fernando PESSOA :

« La littérature est la preuve que la vie ne suffit pas. »

Sauf le respect que je lui dois, je ne crois pas que ce soit exactement ça.

Mais je peux me tromper et si certains d’entre vous sont soulagés par ce que j’ai envie de nommer « la croyance des pavés », ma foi, je ne m’y oppose pas !

 

Je réfléchis juste quelques instants ; je vous prie d’ailleurs de bien vouloir noter les questions.

-        La vie c’est quoi ?

-        Un déluge ?

-        Un subterfuge ?

-        Du grabuge ?

-        Et la littérature en serait le refuge ?

 

La Vie était, est et sera…

Notez bien ça !

La littérature est temporelle ; la Vie, elle, éternelle…

C’est comme ça !

N’en déplaise à la grande lectrice que je suis, n’en déplaise à mes amis, mes élèves, n’en déplaise aux académiciens, aux prix Goncourt, Renaudot and co, la littérature est datée, tristement datée et probablement déjà quasi achevée depuis des années.

On achève bien les chevaux, les taureaux, les bestiaux, les troupeaux, et vous croyez qu’on va laisser les mots vivre ainsi longtemps en courant sur les pages pour nous faire rêver ?

Le fléau de la censure est déjà à l’œuvre…

Renseignez-vous !

La littérature ce n’est pas une preuve, c’est un cri.

Les cris sont étouffés, les vivants muselés, les écrivains suspendus.

La littérature était, mais ne sera plus.

Et morte, elle ne peut être Vie ; c’est ainsi !

La voilà l’illusion dont nous nous berçons à l’envi.

Les gens ne crient plus ; ils savent que personne ne les écoute ici-bas.

Vous-même faites semblant, je le sais bien !

Le bâillon les a peut-être déjà étouffés, alors faute de mots à déclamer, ils cassent, pillent et font du bruit – avec le corps – preuves à l’appui, puis font silence – avec l’esprit- cherchant la Vie.

Je ne m’en prends pas à la littérature, bien au contraire car c’est ma passion, mais qu’on le veuille ou non, elle disparait ; elle a été jetée aux orties, le bébé avec l’eau du bain, le zeste parfumé avec la pourriture, ainsi va la littérature au fil des années…

N’en jetez plus !

Certains ne crient pas. Ils n’ont pas le temps ; de lire non plus d’ailleurs…

Non pas qu’ils n’aient rien à dire, à médire mais parce que le labeur les empêche d’écrire ou tout simplement parce qu’ils ne savent plus quoi écrire !

Je parle bien sûr de ceux, peu nombreux qui ont eu la chance inouïe d’apprendre !

Il y a les rêveurs aussi, qui content la vie en peinture, en photos et ce n’est pas littérature mais un regard posé sur ce à quoi on n’attend pas : le beau.

Figé, mais inerte.

Pour le dire autrement la vie ce n’est pas ça ; les mots ne suffisent pas et les romans d’amour, de guerre n’auront jamais l’émoi de la chair vivante qui arpente la terre en se demandant pourquoi elle est là, que ce soit dans un lit ou dans un champ au combat.

Pages, noircissez-vous…

-        Dans les mines les enfants charbonnent.

Feuilles remplissez-vous…

-        Dans les fermes les agriculteurs se tuent.

Brouillons, réveillez-vous…

-        Il est encore temps, le crois-tu ?

Sortez de votre silence et criez encore et encore, si vous en avez le temps.

Mais prudence !

La Vie avance à petits pas sans se soucier de vos tracas.

Un petit secret ?

La Vie est dans un ailleurs délicat à écrire.

Elle conspire.

Elle respire.

Elle attend.

Elle surprend.

Elle vibre.

La Vie n’est que révélation.

Les entourloupes, les envolées littéraires, les romances n’ont que faire de nos vraies histoires, de nos misérables tranches de vie comme on dit ; elles contiennent, maintiennent, soutiennent, retiennent tout ce que nous ne savons dire et, avouons-le, humblement, nous ne savons pas grand-chose !

 

La littérature est temporelle ; la Vie, elle éternelle…

C’est déjà ça, vous ne croyez pas ?

 

Voici le sujet que nous traiterons mardi prochain : le pessimisme dans la littérature.

Réflexion à partir de la citation de Georges ORWELL dans « 1984 » :

« Dans notre monde, il n'y aura pas d'autres émotions que la crainte, la rage et l'humiliation. (. .. ) Il n'y aura ni art, ni littérature. (. .. ) Il n'y aura ni curiosité ni joie de vivre. »

 

A mardi prochain !

 

Annick SB   décembre 2020

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6 commentaires:

  1. merci pour ce brillant exposé, Madame Ravie, si le prochain cours est intitulé "le pessimisme dans la littérature" , c'est que celui ci s'appelait "l'optimisme dans la littérature ?"

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    1. Non non ; celui -ci c'était l'illusion dans la littérature !!! ;-)

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  2. J'aime bien le nom de la conférencière.
    Bises

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    1. hihihi!!! Cela ne m'étonne pas de toi Santounette ;-)

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  3. Un exposé tout en finesse.
    Je n'aurai pas su écrire la chose avec autant d'aisance et d'humour.
    Un discours rafraichissant.

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  4. Bonsoir Annick SB: La littérature est belle illusion. L'optique des mots nous embrouille. Les nouvelles technologies de communication rendent possible sa mort prochaine. Heureusement avec la vie éternelle, il en restera toujours quelques beaux textes. Bon week-end.

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